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Décision CARREFOUR Market
14 avril 2020

Ordonnance de Référé du 14 AVRIL 2020
INSPECTION DU TRAVAIL de Lille,
Syndicat CFDT

Société C.S.V.
ENSEIGNE CARREFOUR MARKET
10 PLACE DE LA REPUBLIQUE
59650 VILLENEUVE D'ASCQ

LA JUGE DES RÉFÉRÉS
Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l'affaire
en délibéré, a statué en ces termes :

Sur autorisation présidentielle donnée le mardi 7 avril 2020 et par acte d'huissier
délivré le mardi 7 avril 2020 à 18h00, Vincent inspecteur du travail
de la section 03-06 de l'unité départementale de Lille a fait assigner la société
C.S.V. exerçant sous l'enseigne Carrefour Market, place de la République à
Villeneuve-d"Ascq, devant le président du tribunal judiciaire de Lille, en référé.

A l'audience du 9 avril 2020 .../...

MOTIFS
Sur la demande de nullité de l'assignation
Selon les dispositions de l'article 752 du Code de procédure civile :
"Lorsque la représentation par avocat est obligatoire. outre les mentions prescrites aux articles 54 et 56. l'assignation contient a peine de nullité :
1 ° La constitution de l'avocat du demandeur ;
2° Le délai dans lequel le défendeur est tenu de constituer avocat.
Le cas échéant, l'assignation mentionne l'accord du demandeur pour que la procédure se déroule sans audience en application de l'article L. 212-5-1 du code de l'organisation judiciaire .. ,
Puis, l'article 760 dudit Code prévoit:
"Les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal judiciaire. La constitution de l'avocat emporte élection de domicile."
Enfin, en vertu de l'article 761 :
"Les parties sont dispensées de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement et dans les cas suivants :
1 ° Dans les matières relevant de la compétence du juge des contentieux de la protection;
2° Dans les matières énumérées par les articles R. 211-3-13 à R.
211-3-16, R. 211-3-18 à R. 211-3-21, R. 211-3-23 du code de /'organisation judiciaire et dans les matières énumérées au tableau IV-li annexé au code de l'organisation judiciaire ;
3° A l'exclusion des matières relevant de la compétence exclusive du tribunal judiciaire, lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 Euros ou a pour obiet une demande indéterminée avant pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 10 000 euros . Le montant de la demande est apprécié conformément aux dispositions des articles 35 à 37. Lorsqu'une demande incidente a pour effet de rendre applicable la procédure écrite ou de rendre obligatoire la représentation par avocat, le juge peut, d'office ou si une partie en fait état, renvoyer l'affaire à une prochaine audience tenue conformément à la procédure applicable et invite les parties à constituer avocat.
Dans les matières relevant de la compétence exclusive du tribunal judiciaire. les parties sont tenues de constituer avocat, quel que soit le montant de leur demande.
L’État, les départements, les régions, les communes et les établissements publics peuvent se faire représenter ou assister par un fonctionnaire ou un agent de leur administration. "
Il convient en outre de rappeler que selon l'article L.4 732-1 du Code du travail auquel se réfère expressément l'inspecteur du travail dans son assignation :
"Indépendamment de la mise en oeuvre des dispositions de l'article L.4721-5, l'inspecteur du travail saisit le juge judiciaire statuant en référé pourvoir ordonner toutes mesures propres à faire cesser le risque, telles que la mise hors se,vice. l'immobilisation, la saisie des matériels. machines, dispositifs, produits ou autres, lorsqu'il constate un risque sérieux d'atteinte à l'intégrité physique d'un travailleur résultant de l'inobservation des dispositions suivantes de la présente partie ainsi que des textes pris pour leur application : [. . .}
4° Livre IV ; [. .. ]
Le juge peut également ordonner fa fermeture temporaire d'un atelier ou chantier. Il peut assortir sa décision d'une astreinte qui est liquidée au profit du Trésor. "
Ce texte ouvre à l'inspecteur du travail un cas spécifique de référé lui permettant de réclamer que soient ordonnées toutes mesures propres à faire cesser un risque sérieux d'atteinte à l'intégrité physique d'un ou plusieurs travailleurs et qui résulte de l'inobservation de dispositions légales expressément visées, sans qu'il soit nécessaire de subordonner le recours au référé à l'absence de contestation sérieuse - l'article 835 du code de procédure civile permettant au demeurant un tel recours même en présence d'une contestation sérieuse, lorsqu'il s'agit de prescrire les mesures conservatoires qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite.
En l'espèce, l'instance a été engagée par Vincent en sa qualité, dont il justifie en début d'audience, d'inspecteur du travail de la section 03-06 de l'unité départementale de Lille ; il s'agit, ce point ne faisant l'objet d'aucun débat, d'une unité dépendant de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des Hauts-deFrance. Les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) sont des services
déconcentrés sous tutelle du ministère du Travail, de l'Emploi et de la Santé et du ministère de l'Economie, des Finances et de l'industrie.
Placées auprès du préfet de région, elles assurent le pilotage coordonné des politiques publiques du développement économique, de l'emploi, du travail et de la protection des consommateurs.
Il convient encore de rappeler que selon l'article L 8112-1 du Code du travail :
"Les agents de contrôle de l'inspection du travail sont membres soit du corps des inspecteurs du travail, soit du corps des contrôleurs du travail jusqu'à l'extinction de leur corps. Ils disposent d'une garantie d'indépendance dans l'exercice de leurs missions au sens des conventions internationales concernant l'inspection du travail.
Ils sont chargés de veiller à l'application des dispositions du code du travail et des autres dispositions légales relatives au régime du travail ainsi qu'aux stipulations des conventions et accords collectifs de travail répondant aux conditions fixées au livre Il de la deuxième partie.
Ils sont également chargés, concurremment avec les officiers et agents de police judiciaire, de constater les infractions à ces dispositions et stipulations. Les agents de contrôle de l'inspection du travail sont associés à la définition des orientations collectives et des priorités d'intérêt général pour le système d'inspection du travail arrêtées, chaque année. par le ministre chargé du travail après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs représentatives, et ils contribuent à leur mise en œuvre. Ils sont libres d'organiser et de conduire des contrôles à leur initiative et décident des suites à leur apporter.
Les attributions des agents de contrôle de l'inspection du travail peuvent être exercées par des agents de contrôle assimilés dans des conditions fixées par voie réglementaire."
Selon le décret n°2003-770 du 20 août 2003 portant statut particulier du corps de l'inspection du travail, dans sa version en vigueur à ce jour, en son article 1er :
"Les inspecteurs du travail constituent un corps interministériel classé dans la catégorie A prévue à l'article 13 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée. Les fonctionnaires du corps de l'inspection du travail, dont la gestion est assurée par les ministres chargés du travail, de l 'emploi et de la formation professionnelle, sont placés sous l'autorité des ministres (. . .)."
Et selon l'article 3 :
I.-Outre les missions qui leur sont imparties par les articles L. 8112-1 et L. 8112-2 du code du travail susvisé, les membres du corps de l'inspection du travail participent à la mise en œuvre des politiques de l'emploi et de la formation professionnelle définies par les pouvoirs publics (. . .).
II.-Les membres du corps de l'inspection du travail apportent leur concours aux missions d'information et de conseil auprès du public dans le domaine de leurs compétences ainsi qu'à celle de conciliation dans la
prévention des conflits collectifs du travail. Ils exercent des fonctions d'encadrement et d'expertise.
III.-Les membres du corps de l'inspection du travail peuvent être affectés à l'administration centrale des ministères mentionnés à l'article 1er .. ,
Vincent ayant fait assigner la société C.S.V., expressément, en sa qualité d'inspecteur du travail et non à titre personnel, il agit donc en sa qualité de membre du corps des inspecteurs du travail, fonctionnaire de l'Etat. Dans le cadre de la présente instance qu'il diligente à l'encontre de la société C.S.V. pour la mise en oeuvre des dispositions de l'article L.4732-1 du Code du travail auquel il se réfère expressément dans son assignati,on, il ne peut être considéré autrement que comme agissant en représentation directe de l'Etat français, au sens des dispositions de l'article 761 dernier alinéa du Code de procédure civile.
Dès lors, Vincent était dispensé de constituer avocat pour assigner.
Il convient donc de rejeter le motif de nullité soulevé par la société C.S.V., tiré du défaut de constitution d'avocat par le requérant.

Sur l'intervention volontaire la C.F.D.T.
Selon les dispositions de l'article L2132-3 du Code du travail :
"Les syndicats professionnels ont le droit d'agir en justice. Ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent .
Par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article 122 du Code de procédure civile que :
"Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt ( .. .).
En l'espèce, le motif tiré de la nullité de l'assignation étant rejeté, le motif d'irrecevabilité de l'intervention volontaire de la C.F.D.T. résultant de ladite nullité, est sans objet. Il n'est pas contesté ensuite par la société C.S.V. que la violation éventuelle des dispositions législatives et réglementa,ires en matière de santé et de sécurité, expose nécessairement la collectivité des salariés, au risque d'atteinte à leur intégrité, et compromet leur sécurité, causant ainsi un préjudice à l'intérêt collectif.
La C.F.D.T. justifie enfin, suivant note en délibéré expressément autorisée à cet effet par le juge des référés à l'audience du 7 avril 2020, reçue par courriel par le juge des référés, le conseil de la société C.S.V. et l'inspecteur du travail le 10 avril 2020 en milieu de journée, de la preuve du dépôt de ses statuts, ainsi que de la qualité des signataires de la "délibération de la commission exécutive" réunie le 8 avril 2020, ayant décidé de l'intervention volontaire de la C.F.D.T. à la présente instance, et du mandat donné au cabinet
d 'avocat LPS à cet effet. Il en résulte que l'intervention volontaire de la Fédération des Services C.F.D.T. en sa qualité de syndicat professionnel, doit être déclarée recevable.

Sur la demande d'audition du "responsable pénal" de la société C.S. V.
En l'absence de demande distincte d'une simple déclaration d'intention que la présente décision soit contradictoire vis-à-vis du défendeur, il n'y a pas lieu de statuer sur ce point.

Sur les demandes principales
Sur les obligations de l'employeur, défendeur à la présente instance
Selon les dispositions de !'articles L 4121 -1 et suivants du code du travail, relatifs aux obligations de l'employeur en matière de santé et sécurité au travail " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1 ° Des actions de prévention des risques professionnels. y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 :
Des actions d'information et de formation :
La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes."
L'article L 4121-2 précise:
"L 'employeur met en œuvre les mesures prévues à l'article L 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :
1 ° Eviter les risques
Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;
Combattre les risques à la source :
Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets cie ceux-ci sur la santé ;
Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;
Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;
Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique. l'organisation du travail, les conditions de travail. les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l'arlicle L. 1142-2-1 ;
Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle :
Donner les instructions appropriées aux travailleurs."
Il résulte enfin de l'article L 4121-3 que :
"L'employeur, compte tenu de la nature des activités de l'établissement, évalue les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, y compris dans le choix des procédés de fabrication, des équipements de travail, des substances ou préparations chimiques, dans /'aménagement ou le réaménagement des lieux de travail ou des installations et dans la définition des postes de travail. Cette évaluation des risques tient compte de l'impact différencié de l'exposition au risque en fonction du sexe.
A la suite de cette évaluation, l'employeur met en œuvre les actions de prévention ainsi que les méthodes de travail et de production garantissant un meilleur niveau de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs . Il intègre ces actions et ces méthodes dans l'ensemble des activités de l'établissement et à tous les niveaux de l'encadrement. Lorsque les documents prévus par les dispositions réglementaires prises pour l'application du présent article doivent faire l'objet d'une mise à jour, celle-ci peut être moins fréquente dans les entreprises de moins de onze salariés, sous réserve que soit garanti un niveau équivalent de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat après avis des organisations professionnelles concernées."
Ces dispositions définissent l'obligation de sécurité qui imposent à l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Il n'est pas contesté qu'elles s'appliquent à la société C.S.V.
Il est contesté en revanche qu'il puisse s'agir d'une obligation de résultat
, l'employeur la qualifiant d'obligation de moyen renforcée sur le fondement de l'arrêt rendu par la Chambre sociale de la cour de cassation le 25 novembre 2015 (n°14-24.444) selon lequel ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail. A pu déduire l'absence de manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat la cour d'appel qui a constaté que celui-ci avait pris en compte les événements violents auxquels le salarié avait été exposé.
Mais en l'espèce, en l'absence de tout débat lié à la réalisation du risque, s'impose à bien à l'employeur la charge de prouver qu'il a pris toutes les mesures nécessaires pour protéger ses salariés.

Puis, l'article R.4421-1 du code du travail invoqué en demande prévoit, s'agissant spécifiquement de la prévention des risques biologiques, que :
" Les dispositions du présent titre sont applicables dans les établissements dans lesquels la nature de l'activité peut conduire à exposer les travailleurs à des agents biologiques. Toutefois, les dispositions des articles R. 4424-2, R. 4424-3, R. 4424-7 à R. 4424-10, R. 4425-6 et R. 4425-7 ne sont pas applicables lorsque l'activité, bien qu'elle puisse conduire à exposer des travailleurs, n'implique pas normalement l'utilisation délibérée d'un agent biologique et que l'évaluation des risques prévue au chapitre Ill [évaluation des risques] ne met pas en évidence de risque spécifique".

Selon les dispositions de l'article R.4422-1 dudit Code:
"L'employeur prend des mesures de prévention visant à supprimer ou à réduire au minimum les risques résultant de l'exposition aux agents biologiques, conformément aux principes de prévention énoncés à l'article L. 4121-2."
En l'espèce, il n'est pas contesté qu'à la date des débats sévit une pandémie de Covid-19, que selon le site du ministère de l'intérieur dont l'inspection du travail rappelle les termes, la maladie se transmet par les gouttelettes, qu'un contact étroit avec la personne malade est nécessaire pour transmettre la maladie: même lieu de vie, contact direct à moins d'1mètre lors d'une discussion, d'une toux, d'un éternuement ou en l'absence de mesures de protection, et que l'un des autres vecteurs privilégiés de la transmission du virus
est le contact des mains non lavées souillées par des gouttelettes. Le virus peut rester quelques heures sur une surface
comme un caddy.
Dans ce contexte, l'activité de vente de détail de marchandises dans un établissement auprès de particuliers expose les salariés, en contact les uns avec les autres et avec le public aux heures d'ouverture du magasin, au Covid19, à l'occasion de tels contacts à moins d'1 mètre, ou lors de la manipulation d'articles contaminés par les gouttelettes. Les dispositions spécifiques au risque biologique ne sont néanmoins pas applicables si l'activité n'implique pas normalement l'utilisation délibérée d'un agent biologique, et si l'évaluation des risques prévue au chapitre 111 ne met pas en évidence de risque spécifique. Or, l'activité de vente de détail de marchandises dans un établissement auprès de particuliers n'implique pas l'utilisation délibérée d'un agent biologique.
Pour autant, l'inspection du travail verse au débat (annexe 5) une mise à jour du document unique d'évaluation des risques professionnels (OU ERP) du site Carrefour Market de Villeneuve-d'Ascq qui identifie un risque biologique spécifique lié aux secteurs "tous postes", activités "Relation clientèle - Vente - Mise en rayon - Réception')" lié au risque : ''Risque biologique - risque d"épidémielpandémie", la "situation de danger" étant définie comme étant la suivante . "Contamination virale type COVID 19".
L'inspecteur du travail produit également des données fiables en ce qu'elles émanent de !'Agence nationale de santé publique ou "Santé publique France", établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle du ministère chargé de la santé, faisant état à la date du 4 avril 2020 de 68 605 cas
de Covid-19 confirmés en France ayant entraîné a minima le décès de 7 560 personnes.
L'exposition des salariés du Carrefour Market exploité par la société C.S.V., au Covid-19, constitue donc bien une exposition à un risque spécifique au sens des dispositions précitées.
Il en résulte que la société C.S.V. est tenue de respecter les règles de prévention des risques biologiques prévus au code du travail et qu'il lui appartient de justifier qu'elle a pris toutes les mesures susceptibles de
supprimer ou réduire au minimum les risques résultant de l'exposition aux agents biologiques.

Sur les mesures demandées par l'inspecteur du travail
La société C.S.V. critique tant le principe que la formulation des demandes formées par l'inspecteur du travail.
Le tribunal examinera point par point ces demandes, en fonction des points demeurant en litige entre les parties au moment de l'audience qui s'est tenue le 9 avril 2020 à 14h00, après un troisième constat réalisé le matin même à 10h12 par l'inspecteur du travail in situ et ayant fait l'objet d'un débat contradictoire à l'audience, et en considération notamment des prescriptions des articles R 4424-2 et R 4424-3 du Code du travail :
"Lorsque les résultats de l'évaluation des risques révèlent l'existence d'un risque pour la santé ou la sécurité des travailleurs, toute exposition à un agent biologique dangereux est évitée."
"Lorsque l'exposition des travailleurs à un agent biologique dangereux ne peut être évitée, elle est réduite en prenant les mesures suivantes :
1 ° Limitation au niveau le plus bas possible du nombre de travailleurs exposés ou susceptibles de l'être ;
Définition des processus de travail et des mesures de contrôle technique ou de confinement visant à éviter ou à minimiser le risque de dissémination d'agents biologiques sur le lieu de travail ;
Signalisation dont les caractéristiques et les modalités sont fixées par un arrêté conjoint des ministres chargés du travail, de l'agriculture et de la santé ;
Mise en œuvre de mesures de protection collective ou, lorsque l'exposition ne peut être évitée par d'autres moyens, de mesures de protection individuelle.
Mise en œuvre de mesures d'hygiène appropriées permettant de réduire ou, si possible. d'éviter le risque de dissémination d'un agent biologique hors du lieu de travail ;
6° Établissement de plans à mettre en œuvre en cas d'accidents impliquant des agents biologiques pathogènes ;
Détection. si elle est techniquement possible, de la présence, en dehors de l'enceinte de confinement. d'agents biologiques pathogènes utilisés au travail ou, à défaut, de toute rupture de confinement ;
Mise en œuvre de procédures et moyens permettant en toute sécurité, le cas échéant, après un traitement approprié, d 'effectuer le tri. la collecte. le stockage, le transport et l'élimination des déchets par les travailleurs. Ces moyens comprennent, notamment. l'utilisation de récipients sûrs et identifiables ;
Mise en œuvre de mesures permettant. au cours du travail, de manipuler et de transporter sans risque des agents biologiques pathogènes."
Si la société C.S.V. estime que le débat doit être circonscrit au fait que 3 salariés sur 20 ne portaient pas de gants en magasin le 3 avril 2020, et que du réassort avait lieu en magasin ce jour-là dans des conditions non objectivées de risque grave et avéré pour les salariés, soulignant notamment que par ailleurs, tous portaient des masques ou visières de protection lors des contrôles du 3 et 9 avril, il ressort des rapports successifs de l'inspecteur du travail en dates des 27 mars, 3 avril et 9 avril 2020 une persistance au 9 avril 2020 des points litigieux suivants :
- un non-respect de la distance sociale de sécurité
admise par toutes les parties comme étant d'1 mètre, exposant les salariés chargés du réassort ;
- un défaut de port des masques de protection par deux salariés en caisses (rapport du 9 avril) ;
- un défaut de contrôle du port effectif des gants ;
- un défaut de présentation des notices des masques ;
- de façon générale, un manque de consignes suffisamment précises de l'employeur à l'attention de ses salariés, illustré par exemple par l'absence de consigne relative à la périodicité du lavage des mains.
A l'issue de l'audience du 9 avril 2020, il apparaît qu'à la suite des mesures prises par l'employeur, ne font plus l'objet d'un débat les points suivants:
- l'augmentation de la surface du plexiglass pour les personnes en caisse afin d'éviter qu'un client se penche pour discuter avec un caissier et entre dans sa zone sociale de sécurité ; l'inspecteur n'en fait plus étal dans son rapport du 9 avril au matin, et l'employeur justifie suffisamment, au vu des photographies
qu'il produit, que les clients, tenus d'emprunter un chemin qui longe une caisse vide avant d'accéder à la zone de paiement et de prise en charge des commissions, ne peuvent plus, même en se penchant depuis cette zone vers le caissier, entrer dans sa distance sociale de sécurité ;
- l'établissement par l'employeur de modalités de paiement en monnaie ; ce dernier ayant mis en place un système de paiement par l'intermédiaire d'une coupelle ;
- pour les salariés qui ne sont pas au réassort ou en caisse (salariés des rayons boucherie, boulangerie) : l'établissement par l'employeur de procédures écrites précises permettant des 'assurer qu'ils ne se déplacent pas au milieu des clients, et que leurs postes de travail soient espacés de plus d'un mètres les uns des autres ; plus aucune observation n'étant formulée sur ce point dans le cadre du rapport de l'inspecteur du travail daté du 9 avril 2020, ou à l'audience.
Il y a lieu de constater par ailleurs que la perception positive par la médecine du travail des mesures mises en place par l'employeur, si elle contribue à brosser le contexte dans lequel s'inscrit la présente instance, ne peut à elle seule établir que ce dernier a pris toutes les mesures susceptibles de supprimer ou réduire les risques résultant de l'exposition aux agents biologiques.
Enfin, il convient d'indiquer aux parties que dans le cadre de son pouvoir d'appréciation, le juge n'est pas lié par les demandes de l'inspecteur du travail telles qu'elles sont formulées.
Les mesures dont l'inspecteur du travail sollicite qu'elle soient imposées par l'employeur par la présente seront examinées dans l'ordre des demandes.

1) Sur "la mise en place d'une organisation de travail permettant de garantir les salariés contre le SARS-CoV-2 incluant :
o une distanciation d'un mètre minimum entre un satané et toutes autres personnes, ce qui peut être facilement garanti en interdisant te réassort pendant l'ouverture du magasin au client en adaptant l'organisation du travail pour éviter qu'un salarié n'ait à travailler dans la zone sociale de sécurité d'une autre personne :
o le port effectif des équipements de protection individuelle adaptés mis à disposition des salariés par l'employeur. Les équipements de protection individuelle devront à minima contenir les masques de protection ..
Il ressort des constats successifs de l'inspecteur du travail et des réponses successives de l'employeur que la question du réassort aux heures d'ouverture du magasin au public constitue le point essentiel d'achoppement dans les échanges entre les parties.
Le tribunal ne peut que constater qu'au delà de la première visite de contrôle, l'inspecteur a encore constaté les 3 et 9 avril dernier, que du réassort était pratiqué aux heures d'ouverture du public, sans que les clients soient empêchés d'accéder à la zone de réassort, ce dont il résulte clairement, compte
tenu de la faible largeur objective des allées centrales - 1,80 mètres selon la responsable du magasin (par opposition aux larges allées définissant le périmètre du magasin), que chaque fois. et ce malgré les explications de l'employeur relative à la faible affluence au sein de son magasin compte tenu
de l'amplitude des horaires d'ouverture et du filtrage des clients, se sont présentées des situation où des salariés croisaient des clients ou étaient susceptibles de croiser des clients, à moins d'un mètres.
L'employeur estime que ces situations s'inscrivent de manière brève dans le temps et souligne l'incivisme des clients.
En considération de ce dernier point ces situations ne peuvent d'autant plus être laissées à la seul maîtrise du salarié par ailleurs absorbé par sa tâche, que ce soit en leur durée ou leur intensité ; elles constituent une exposition indéniable au risque biologique encouru, la distanciation sociale étant la mesure la plus forte préconisée par les pouvoirs publics dans le cadre de la pandémie afin d'éviter la contamination entre les personnes, à tel point que la population a à l'heure actuelle depuis 4 semaines, l'obligation de demeurer confinée à son domicile, à de rares exceptions près.
Si la société C.S.V. fait également valoir, de manière légitime, qu'elle doit pouvoir continuer à alimenter la population en limitant l'affluence en magasin par une amplitude horaire suffisamment large, elle s'en est tenue aux mesures d'hygiène et de filtrage mises en place ainsi qu'aux informations diffusées à l'attention de ses salariés et de ses clients, sans justifier avoir véritablement tenté à ce jour de mettre en place des dispositifs dissuasifs propres à limiter effectivement et radicalement la possibilité pour les clients d'entrer dans la distance sociale de sécurité des salariés occupés au réassort.
La société C.S.V. en a d'ailleurs conscience puisque l'inspecteur du travail note, à l'occasion de son contrôle du 9 avril 2020, que selon le gérant· Le réassort des rayons se fait hors horaire d'ouverture au public ou en fermant les rayons"; selon ses propres explications à l'audience, tel n'est pas le cas puisqu'il fait état de réassort sur des périodes d'ouverture du magasin sans jamais évoquer une éventuelle fermeture des rayons. Il apparaît ainsi que sans qu'il y ait lieu, en l'état des constats de l'inspecteur du travail et des mesures successivement mises en places par l'employeur, d'interdire le réassort durant les heures d'ouverture au public du magasin, il convient de dire que la société C.S.V. devra imposer aux clients du
magasin une limite physique leur rendant clairement inaccessibles les rayons concernés par le réassort au moyen d'un dispositif empêchant le passage, par exemple au moyen d'un dispositif de rubans de signalisation.
Il y a lieu également de dire que l'employeur devra donner des consignes strictes, en exigeant le respect de ces consignes, afin que les salariés cheminent, autant que la configuration des lieux le permet, entre l'entrepôt et les points de réassort en rayon, par les allées latérales du magasin, qui sont les plus larges, afin de réduire au maximum le risque de croiser un autre salarié ou un client à moins d'un mètre.
Il appartiendra encore à l'employeur :
- de donner des consignes strictes, en exigeant le respect de ces consignes,
afin que tous les salariés se tiennent mutuellement, en-dehors de leur distance sociale de sécurité
;
- de donner des consignes strictes, en exigeant le respect de ces
consignes, afin que tous les salariés portent le masque de protection qu'il leur fournit ;
- de donner des consignes strictes, en exigeant leur respect, afin que tous les salariés, au choix de l'employeur :
o portent en permanence des gants
Ou bien
o se lavent les mains selon une fréquence qui sera imposée par l'employeur ;

- de s'adresser à la médecine du travail dans l'éventualité où des salariés feraient état :
o d'une gêne insurmontable au port du masque,
o d'une gêne insurmontable au port de gants ou d'une inadaptation des gants fournis à la tâche assignée ;
afin de recueillir les préconisations de la médecine du travail sur ces problématiques et s'y conformer.

2) De tenir, à disposition dans l'établissement, les notices, conformes aux dispositions de l'annexe Il visée à l'article R 4312-6 du Code du travail, des équipements de protection individuelles utilisées pour garantir la santé des salariés.
Selon les dispositions de l'article R 4312-6 du Code du travail :
"Les équipements de protection individuelle, neufs ou considérés comme neufs, sont soumis aux règles techniques de conception et de fabrication prévues par l'annexe Il figurant à la fin du présent titre."
Il ressort notamment de ladite annexe Il que :
"1. 4. Notice d'instructions
-Chaque équipement de protection individuelle est accompagné d'une notice d'instructions contenant, outre Je nom et l'adresse du fabricant ou de l'importateur ainsi que le nom. l'adresse et le numéro d'identification de l'organisme qui a procédé à l'examen CE de type, les données suivantes :
a) Les instructions de stockage, d'emploi, de nettoyage, d'entretien. de révision et de désinfection. Les produits de nettoyage, d'entretien ou de désinfection préconisés ne doivent avoir, dans le cadre de leur mode d'emploi, aucun effet nocif sur les équipements de protection individuelle ni sur l'utilisateur ;
b) Les performances obtenues lors d'examens techniques visant à s'assurer des niveaux ou classes de protection des équipements de protection individuelle :
c) Les accessoires utilisables avec les équipements de protection individuelle, ainsi que les caractéristiques des pièces de rechange appropriées :
d) Les classes de protection appropriées à différents niveaux de risques et les limites d'utilisation correspondantes ;
e) La date ou le délai de péremption des équipements de protection individuelle ou de certains de leurs composants dans les conditions fixées par les règles définies aux 2 et 3, notamment par le paragraphe 2.4;
f) Le genre d'emballage approprié au transport des équipements de protection individuelle ;
g) La signification du marquage, lorsqu'il en existe un.
La notice doit en outre comporter toute autre indication prévue par la présente annexe.
-La notice d'instructions doit être rédigée en français, de façon précise et compréhensible. ,.
En l'espèce, il y a lieu de dire que la société C.S.V. devra se procurer les notices, qui apparaissent essentielles au bon usage des équipements de protection, correspondant aux masques et gants qu'elle fournit aux salariés, et les tenir à disposition au sein de son établissement Carrefour Market.
3) D'établir une consigne d'utilisation pour chaque EPI utilisé dans l'établissement conforme aux dispositions de l'article R 4323-105 du Code du travail.
Selon les dispositions de l'article R 4323-105 du Code du travail :
"L 'employeur élabore une consigne d'utilisation reprenant de manière compréhensible les informations mentionnées aux 1 ° et 2° de l'article R.4323-104. Il tient cette consigne à la disposition des membres du comité social et économique, ainsi qu'une documentation relative à la réglementation applicable
à la mise à disposition et à l'utilisation des équipements de protection individuelle concernant les travailleurs de l'établissement." En l'espèce, il appartiendra à l'employeur, indépendamment des affichages qu'il a mis en place au sein du magasin , de déterminer des consignes claires et précises de mise en place et retrait des masques et des gants.
4) De procéder à l'information et à la formation des salariés sur le port des EPI , conformément aux dispositions des articles R 4323-104 et -106 du Code du travail
L'article R 4323-104 du Code du travail prévoit que :
"L'employeur informe de manière appropriée les travailleurs devant utiliser des équipements de protection individuelle :
1 ° Des risques contre lesquels l'équipement de protection individuelle les protège ;
Des conditions d'utilisation de cet équipement. notamment les usages auxquels il est réservé ;
Des instructions ou consignes concernant les équipements de protection individuelle ;
Des conditions de mise à disposition des équipements de protection individuelle."
Et selon l'article R 4323-106 dudit Code :
"L'employeur fait bénéficier les travailleurs devant utiliser un équipement de protection individuelle d'une formation adéquate comportant, en tant que de besoin, un entraînement au port de cet équipement. Cette formation est renouvelée aussi souvent que nécessaire pour que l'équipement soit utilisé conformément à la consigne d'utilisation.
En l'espèce, indépendamment des affichages mis en place au sein de l'établissement, l'employeur ne justifie pas avoir procédé à l'information individuelle et à la formation individuelle des salariés sur le port des masques et des gants qu'il leur fournit, conformément aux dispositions des articles R 4323-104 et R 4323-106 du Code du travail ; il lui appartiendra d'y remédier.
5) De tenir à dispositions des salariés les informations listées par l'article R 4425-4 du Code du travail
Selon l'article R 4425-4 du Code du travail :
"Lorsque les résultats de l'évaluation des risques révèlent l'existence d'un risque pour la santé ou la sécurité des travailleurs, l'employeur tient à la disposition des travailleurs intéressés et du comité social et économique les informations suivantes :
1 ° Les activités au cours desquelles les travailleurs sont exposés à des agents biologiques pathogènes, les procédures, les méthodes de travail et les mesures et moyens de protection et de prévention correspondants ;
2° Le nombre de travailleurs exposés ;
3° Le nom et l'adresse du médecin du travail ;
4° Le nom de la personne qui, le cas échéant, est chargée par l'employeur, et sous sa responsabilité, d'assurer en cette matière la sécurité sur le lieu de travail ;
Un plan d'urgence pour la protection des travailleurs contre l'exposition aux agents biologiques des groupes 3 ou 4 en cas de défaillance du confinement physique."
En tant que de besoin, il y a lieu de dire qu'il appartiendra à la société C.S.V. de se conformer à cette obligation en tenant à la disposition des travailleurs intéressés et du comité social et économique les informations prévues à l'article R 4425-4 du Code du travail.
6) De procéder à la formation à la sécurité relative au risque biologique des travailleurs prévues à l'article R 4425-6 du Code du travail, et ce avant toute activité les exposant à un risque biologique. Cette formation sera répétée autant de fois que nécessaire.
Selon l'article R 4425-6 du Code du travail .
''L'employeur organise au bénéfice des travailleurs une formation à la sécurité portant sur :
1 ° Les risques pour la santé et les prescriptions en matiére d'hygiène ;
Les précautions à prendre pour éviter l'exposition :
Le port et l'utilisation des équipements et des vêtements de protection individuelle ;
Les modalités de tri, de collecte, de stockage, de transport et d'élimination des déchets ;
Les mesures à prendre pour prévenir ou pallier les incidents ;
La procédure à suivre en cas d'accident. "
En l'espèce et compte tenu de la situation sanitaire évolutive liée à la pandémie causée par le Covid-19 qui est un coronavirus encore mal connu, il apparaît nécessaire d'imposer à l'employeur de procéder à la formation à la sécurité relative au risque biologique des travailleurs prévues à l'article R 4425-6 du Code du travail, et surtout de répéter cette formation autant de fois que nécessaire.
7) D'informer le service de santé au travail de l'exposition des salariés à un risque et de mettre en œuvre la surveillance médicale prévue pour le risque biologique aux articles R 4426-1 à -13 du Code du travail
L'employeur justifie par la productions de courriels récents de la qualité de ses échanges avec la médecine du travail compte tenu du fait que selon cette dernière, il y avait lieu de le "féliciter' de "toutes les mesures de prévention (. . .) mises en place au sein de votre magasin", en sorte qu'il n'apparaît pas qu'il
y ait lieu de faire droit à cette demande.
8) A défaut de pouvoir garantir la santé des salariés contre le SARS-Co V2, de procéder à la fermeture de l'établissement. En l'état des mesures prises par l'employeur depuis le premier contrôle effectué sur site le 27 mars 2020, cette mesure n'apparaît pas justifiée. Il ne convient donc pas d'y faire droit.
9) La transmission, journalière, de l'intégralité des images de vidéosurveillance de l'établissement aux personnes en charge du contrôle des mesures ordonnées, dans un format de fichier lisible par ces dernières, afin d'éviter le risque de contamination au SARS-CoV-2 pour les personnes désignées par Monsieur le président pour constater le respect des mesures ordonnées.
En l'état des mesures prises par l'employeur depuis le premier contrôle effectué sur site le 27 mars 2020, cette demande apparaît excessive par rapport à l'objectif recherché.
L'astreinte apparaît suffisante à garantir la bonne exécution des obligations.
10) De justifier, par écrit, des mesures prises pour se conformer aux ordonnances de référé, auprès de l'inspecteur du travail. Il devra être justifié de la bonne exécution de ces obligations et du respect des délais auprès de Vincent inspecteur du travail de la section de la section 03-06 de l'unité départementale de Lille de la DlRECCTE Hauts-de-France.

Sur la demande d'astreinte
Une astreinte apparaît nécessaire s'agissant d'obligations de faire urgentes.
Il convient de dire :
- que ces obligations mises à la charge de l'employeur par la présente ordonnance devront être exécutées dans le délai de trois jours ouvrables suivant la signification de l'ordonnance ,
- que l'employeur devra justifier de la bonne exécution de ces obligations et du respect des délais auprès de de l'inspecteur du travail de la section de la section 03-06 de l'unité départementale de Lille de la DIRECCTE Hauts-de-France :
- qu'à défaut la société C.S.V. devra payer une astreinte provisoire d'un montant de 500 Euros par jour de retard, et par obligation inexécutée. telles que définies aux points 1) à 6) inclus, et 10) ci-dessus, pendant trois mois.
Les circonstances particulières du présent litige justifient que le juge des référés se réserve la liquidation de l'astreinte.
Le requérant sera débouté du surplus de ses demandes au titre de !'astreinte.
Sur le rappel à l'employeur des dispositions de l'article L 263-5 du Code du travail
Selon les dispositions de l'article L 263-5 ancien du Code du travail :
"Les décisions du juge des référés prévues aux articles L. 263-1 et L.263-3-1, la décision de l'inspecteur prévue au premier alinéa de l'article L.231-12 ainsi que les condamnations prononcées en application de l'article L.263-4 ne peuvent, sous réserve des dispositions de l'alinéa suivant, entraîner ni rupture. ni suspension du contrat de travail. ni aucun préjudice pécuniaire à l'encontre des salariés concernés ( .. .). .,
En l'espèce, aucun des constats posés par l'inspection du travail ne signale une quelconque volonté de l'employeur de s'en prendre à ses salariés : le gérant de la société C.S.V. apparaissant au contraire quelque peu gêné pour imposer un cadre strict assorti de sanctions.
Il ne convient donc pas de faire droit à cette demande.
Sur la demande de désignation d'un huissier de justice aux fins de constater le respect des mesures ordonnées
La présente décision constitue un titre exécutoire qui impose à la société CSV à exécuter diverses obligations et de rendre compte de leur bonne et prompte exécution, à peine d'astreinte. Il n'est donc pas nécessaire de désigner un huissier pour opérer des constats.
Sur l'autorisation d'accès de Vincent inspecteur du travail, aux enregistrements de vidéosurveillance de l'établissement, aux fins de constater le respect des mesures ordonnées
La demande de transmission, journalière des images de vidéosurveillance de l'établissement aux fins de constater le respect des mesures ordonnées a été rejetée au constat que cette mesure était excessive
par rapport à l'objectif recherché.
Par ailleurs, il a d'ores et déjà été ordonné que l'employeur justifie de la bonne exécution des obligations mises à sa charge et du respect des délais, auprès de l'inspecteur du travail de la section de la section 03-06 de l'unité départementale de Lille de la DIRECCTE Hauts-de-France.
Il y a donc lieu de débouter le requérant de ce chef de demande.

Sur l'exécution sur minute
L'article 489 du code de procédure civile prévoit que :
" En cas de nécessité, le juge peut ordonner que l'exécution de l'ordonnance de référé aura lieu au seul vu de la minute."
En l'espèce, il est imposé à la société C.S.V. des obligations de faire qui nécessitent qu'elle prenne des mesures organisationnelles et en assure la diffusion à ses salariés. Il est donc impossible de les exécuter dès l'instant même où l'ordonnance sera signifiée et même en tenant compte de la situation d'urgence, il doit lui être laissé un délai non déraisonnable, pour exécuter volontairement.
L'ordonnance ne sera donc pas exécutoire sur minute.

Sur la demande du syndicat
La demande de fermeture du magasin n'apparaît pas suffisamment justifiée au regard des constats posés, en sorte qu'il convient de débouter la C.F.D.T. de ce chef de demande.

Sur les dépens et les frais de l'article 700 du code de procédure civile
Il y a lieu de condamner la société C.S.V., qui succombe, à supporter les dépens de l'instance.
Sa demande d'indemnité procédurale devra pour le même motif, être rejetée.
Enfin, il n'apparaît pas inéquitable de la condamner à payer à la C.F.D.T. la somme de 1 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS
Nous, juge des référés, par ordonnance contradictoire et susceptible d'appel,
REJETONS l'exception de nullité de l'assignation soulevé par la société C.S.V., tiré du défaut de constitution d'avocat par le requérant ;
DECLARONS recevable l'intervention volontaire de la Fédération des Services C.F.D.T. ;
DISONS que la société C.S.V. devra :
1) - Imposer aux clients du magasin une limite physique leur rendant
clairement inaccessibles les rayons concernés par le réassort au moyen d'un
dispositif empêchant le passage, par exemple au moyen d'un dispositif de
rubans de signalisation ;
- Donner des consignes strictes, en exigeant le respect de ces consignes,
afin que les salariés cheminent autant que la configuration des lieux le permet,
entre l'entrepôt et les points de réassort en rayon , par les allées latérales du magasin ;
- Donner des consignes strictes, en exigeant le respect de ces consignes,
afin que tous les salariés se tiennent mutuellement, en-dehors de leur distance sociale de sécurité ;
- Donner des consignes strictes, en exigeant le respect de ces consignes,
afin que tous les salariés portent le masque de protection qu'il leur fournit ;
- Donner des consignes strictes en exigeant le respect de ces consignes,
afin que tous les salariés, au choix de l'employeur :
o portent en permanence des gants
Ou bien
o se lavent les mains selon une fréquence qui sera imposée par l'employeur ;
- S'adresser à la médecine du travail dans l'éventualité où des salariés feraient état :
o d'une gêne insurmontable au port du masque,
o d'une gêne insurmontable au port de gants ou d'une inadaptation des gants fournis à la tâche assignée ;
afin de recueillir les préconisations de la médecine du travail sur ces problématiques et s'y conformer.
2) Se procurer les notices correspondant aux masques et gants qu'elle fournit aux salariés et les tenir à disposition au sein de son établissement Carrefour Market ;
3) Déterminer des consignes claires et précises de mise en place et retrait des masques et des gants ;
4) Procéder à l'information individuelle et à la formation des salariés sur le port des maques et des gants qu'il leur fournit, conformément aux dispositions des articles R 4323-104 et R 4323-106 du Code du travail ;
5) Tenir à la disposition des travailleurs intéressés et du comité social et économique les informations prévues à l'article R 4425-4 du Code d'u travail ;
6) Procéder à la formation à la sécurité relative au risque biologique des travailleurs prévues à l'article R 4425-6 du Code du travail, et répéter cette formation autant de fois que nécessaire :
7) à 9) Non lieu
10) Justifier de la bonne exécution de ces obligation et du respect des délais auprès de Vincent RE, inspecteur du travail de la section de la section 03-06 de l'unité départementale de Lille de la DIRECCTE Hauts-de-France ;

DISONS que ces obligations devront être exécutées dans les trois jours ouvrables suivant la signification de l'ordonnance ;
DISONS qu'il devra être justifié de la bonne exécution de ces obligation et du respect des délais auprès de Vincent inspecteur du travail de la section de la section 03-06 de l'unité départementale de Lille de la DIRECCTE Hauts-de-France ;
DISONS qu'à défaut la société C.S.V. devra payer une astreinte provisoire payer une astreinte provisoire d'un montant de 500 Euros par jour de retard , et par obligation inexécutée telles que définies aux points 1) à 6) inclus et 10) cidessus, pendant trois mois ;
DISONS que le juge des référés se réserve la liquidation de !'astreinte ;
REJETONS les autres demandés formées par le requérant ;
DISONS n'y avoir lieu à rendre l'ordonnance exécutoire sur minute ;
REJETONS la demande de la Fédération des services C.F.D.T. aux fins de fermeture du magasin :
CONDAMNONS la société C.S.V. à payer à Fédération des services C.F.D.T.
la somme de 1 000 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNONS la société C.S.V. à supporter les dépens de l'instance.
La présente ordonnance a été signée par la juge et le greffier.

EN CONSÉQUENCE
LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE MANDE ET ORDONNE
A tous huissiers de justice sur ce requis, de mettre les présentes à exécution ;
Aux Procureurs Généraux et aux Procureurs de la République près des Tribunaux Judiciaires d'y tenir la main ;
A tous Commandants et Officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu'ils en seront légalement requis ;
En foi de quoi les présentes ont été signées et scellées du sceau du Tribunal ;
POUR EXPÉDITION CONFORME