GUIDE PRATIQUE


 

Critères d'ordre des licenciements

Loi sur la Sécurisation de l'Emploi

Le Portage Salarial enfin encadré

La Nouvelle loi sur le harcèlement sexuel

Perte du permis de conduire et licenciement

Crédit d'heures et Primes Variables

Le harcèlement moral Collectif reconnu par les juges 

Harcèlement moral : en cas d'agissements répétés

Report des Congés Payés en cas de maladie

Heures supplémentaires : ce qui va changer

Les congés pour soigner un membre de sa famille

Guide Commercial UGICT

Les Comités d'Entreprise et la CNIL

Le Congé Formation Économique, Sociale et syndicale

La validation des Accords d'Entreprise

Les registres obligatoires dans l'entreprise

La Validation des Aquis de l'Expérience Professionnelle

CHSCT : Obligations de l'Employeur

Conditions de Travail : évaluer et prévenir

Temps de travail : suppression des heures d'équivalence ?

Licenciements économiques : critères d'ordre

Avantages en nature

Licenciement abusif

Paiement du temps de trajet

Réduire le risque au travail

Loi de modernisation sociale

Le congé de paternité

Les contraintes vestimentaires au travail

Un salarié peut-il refuser une tâche ?

Obtenir le paiement des heures supplémentaires

Confidentialité du courrier électronique

Égalité homme / femme

Licenciement pour maladie

La taxe Tobin

Calculer et préparer sa retraite

 

 

Licenciement abusif, 
quelles indemnités pour les salariés ?

 

Les indemnités allouées aux salariés victimes d'un licenciement abusif sont notoirement insuffisantes. Même s'il doit tenir compte, dans certains cas, des planchers ou des plafonds fixés par la loi, le juge reste relativement libre d'en fixer le montant. Le point sur un mécanisme complexe.

A LA FOIS ÉCONOMIQUE ET MORAL, le préjudice né d'un licenciement revêt un caractère tout aussi individuel que collectif : les répercutions sur l'entourage du salarié et sur la société tout entière, notamment dans les régions sinistrées, sont incontestables. Ce constat aurait dû conduire le législateur à sanctionner lourdement les licenciements hors la loi en contraignant les employeurs, d'une part à réintégrer tout salarié abusivement licencié, et, d'autre part, à leur verser de substantielles indemnités. Il n’en n'est rien. Hormis les hypothèses, encore restreintes, où le juge déclare la nullité du licenciement, la réintégration ne peut être imposée aux employeurs. Quant aux sommes octroyées, elles sont loin de réparer l'intégralité des dommages causés. Ces indemnités ne sont en outre pas les mêmes selon la faute commise par l'employeur, l'ancienneté du salarié et la taille de l’entreprise, ce qui rend le système franchement opaque.

 

  • Indemnisation d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse

Lorsque les juges constatent que le licenciement d'un salarié ne comporte pas de motif ou repose sur une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, une indemnité est octroyée au salarié variant selon l'ancienneté de ce dernier et la taille de son entreprise. La loi distingue deux catégories de salariés:

- ceux qui ont plus de deux ans d'ancienneté et qui travaillent dans une entreprise de 11 salariés ou plus ("catégorie I");

- les autres, c'est-à-dire ceux qui totalisent moins de deux ans d'ancienneté et / ou dont l'entreprise comporte moins de 11 salariés (" catégorie 2"). Pour les salariés de la catégorie I, l'indemnité allouée ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois (I). Quant aux salariés de la catégorie 2, la loi ne leur accorde aucune garantie minimale. Il est tout bonnement indiqué que l'indemnité est évaluée par le juge en fonction du préjudice subi (2). Dans les deux cas, les sanctions indemnitaires ne sont pas plafonnées par la loi. Ce qui signifie que le juge est parfaitement libre, ce qu'il fait trop rarement, d'accorder des indemnités réparant véritablement "l'atteinte à celle liberté essentielle dont le salarié est victime : celle de pouvoir gagner sa vie en travaillant". Le montant de l'indemnité doit tenir compte, entre autres, des difficultés à retrouver un emploi, des répercutions financières du licenciement, des éventuels troubles psychologiques, de la perte des avantages liés à la carrière dans l'entreprise, etc.

 

  • Le non respect de la procédure de licenciement

L'entretien préalable et les délais à respecter entre les différentes étapes de la procédure répondent a un soucis de protection du salarié, et garantissent, du moins en théorie, l'exercice des droits de la défense. Et pourtant, les employeurs qui grillent ces étapes sont très faiblement sanctionnés. Pour les salariés de la 1re catégorie, la loi prévoit une indemnité équivalente à un mois de salaire, tout au plus. Pour ceux de la catégorie 2, c'est à nouveau le juge qui évalue le montant des indemnités en fonction du préjudice subi.

En cas de procédure collective de licenciement pour motif économique, lorsque les dispositions légales relatives à la consultation du comité d'entreprise et à l'information de l'inspecteur du travail ne sont pas respectées, les salariés, quel que soit leur ancienneté et la taille de l’entreprise, ont droit à une indemnité fixée selon le préjudice subi (4). Lorsqu'il existe une procédure conventionnelle de licenciement, par exemple l'obligation, prévue par un accord d'entreprise, de consulter préalablement au licenciement un conseil de discipline, et que cette procédure n'est pas respectée, les juges considèrent le licenciement comme étant sans cause réelle et sérieuse. L'indemnité versée aux salariés de la catégorie 1 est donc équivalente, au minimum, aux six derniers mois de salaires. Elle est librement évaluée par le juge pour ceux de la catégorie 2.

 

  • Absence d’information du salarié relative à son assistance par un conseiller

Lors de l'entretien préalable au licenciement, la loi autorise le salarié à se faire assister par un tiers. Cette possibilité est néanmoins strictement encadrée. S'il existe des représentants du personnel dans l'entreprise, ce tiers doit appartenir au personnel de l'entreprise. En l'absence d'institutions représentatives du personnel, le choix du salarié doit se porter sur une liste de "conseillers " , établie par le préfet (5). La lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement informe le salarié de ce droit et précise l'adresse des services où la liste des conseillers du salarié peut être consultée. Le rôle du conseiller du salarié est primordial au moins à deux égards. D'une part, il est chargé d'une mission d'assistance auprès du salarié, qui consiste, à la fois, à préparer l'entretien avec lui et à le conseiller. D'autre part, il note tout ce qu'il voit et entend lors de l'entretien. En cas de litige ultérieur, ces notes peuvent être produites devant la juridiction prud'homale comme élément de preuve (6). L'entretien préalable constitue donc une sorte de tentative de conciliation au cours de laquelle le salarié organise sa défense. il est par conséquent essentiel que ce dernier puisse se faire épauler, ou du moins, soit averti de cette possibilité. Jusqu'ici, les employeurs qui "oubliaient" d'inscrire la mention relative au conseiller du salarié sur la lettre de convocation à l'entretien préalable étaient sanctionnés de façon significative par les juges. Les salariés ayant moins de 2 ans d'ancienneté et / ou travaillant dans une entreprise de moins de 11 salariés, s'il s'avérait que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, percevaient une indemnité qui ne pouvait être inférieure aux salaires des six derniers mois (7). Cette solution résultait d’une application logique de la combinaison des articles L 122-14-5 et L. 122-14-4 du Code du travail. En principe forfaitaire, l'indemnité était néanmoins diminuée pour les salariés ne totalisant pas six mois d'ancienneté. Elle devait, au maximum, correspondre au salaire perçu par le salarié (8). Un arrêt du 5 février 2003 marque un net recul sur cette question.

Désormais, l'absence d'information du salarié, de son droit à se faire assister lors de l'entretien préalable, dans les entreprises dépourvues de représentants du personnel, est sanctionnée par l'octroi d’une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire (9). Cette sanction, très faible, assimile le droit à l'assistance du salarié à un simple élément de procédure; or, bien au contraire, ce droit vise à donner au salarié la possibilité d'organiser sa défense.

La perte d'une chance de conserver son emploi, de toute évidence, ne peut être indemnisée par un mois de salaire.

 

  • Si la licenciement est sans cause réelle et sérieuse et si l'employeur ne respecte pas la procédure

Y a-t-il cumul des indemnités pour absence de cause réelle et sérieuse et pour non respect de la procédure ? Là encore, la solution diffère entre les salariés de la catégorie 1 et ceux de la catégorie 2.

Pour les salariés de la catégorie 1, la cour de cassation considère que les indemnités ne se cumulent pas et que seule doit être attribuée l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. L'employeur peut donc multiplier les infractions en toute impunité, il n'est sanctionné que pour la plus grave.

Il y a en revanche cumul pour les salariés de la catégorie 2. L'arrêt de la Cour de cassation du 5 février 2003 réaffirme ce principe : lorsque le licenciement de ces salariés est sans cause réelle et sérieuse, ces derniers ont droit, outre l'indemnité sanctionnant le non respect de la procédure, à une indemnité destinée à réparer le préjudice subi.

 

  • Cas du licenciement nul

Certains licenciements, parce qu'ils violent des libertés individuelles ou collectives, parce qu'ils sont discriminatoires, ou parce qu'ils ne respectent pas certaines dispositions en matière de licenciement économique (10), sont considérés comme nuls.

Le salarié peut alors demander au juge qu'il ordonne sa réintégration dans l'entreprise, ou préférer être indemnisé. Dans ce dernier cas, les juges octroient généralement une indemnité minimale de six mois de salaires (11). L'article L122-14-4 alinéa 1 du Code du travail, prévoit toutefois une exception en cas de nullité du plan social. Le salarié qui ne demande pas sa réintégration a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des douze derniers mois.

Précisons pour finir que toutes ces indemnités peuvent être réclamées durant un délai de 30 ans à compter du licenciement.

 

  • Réclamer des indemnités pour licenciement vexatoire

Les mauvais traitements se manifestent fréquemment à l'occasion d'un licenciement. On dit d'un licenciement qu'il est vexatoire lorsqu'il est effectué de façon dégradante pour le salarié. Il s'agit par exemple pour ce dernier de ce voir chassé de son bureau avec interdiction d'y remettre les pieds, alors qu'aucune faute grave n'a été commise. Idem lorsque l'employeur porte à la connaissance du personnel, lors de réunion de service, les motifs pour lesquels il engage une procédure disciplinaire à l'encontre d'un salarié (Cass. Soc. 25 février 2003, pourvoi n° 00-42-031). Ces procédés infamants sont susceptibles de donner lieu à des dommages et intérêts distincts de ceux alloués par le juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ou en cas de non respect de la procédure. La Cour de Cassation décide donc qu'il peut y avoir cumul de  ces indemnités (Cass. Soc. 8 décembre 1995). Par ailleurs, un licenciement justifié au regard de la loi peut ouvrir droit à des indemnisations s'il est effectué dans des conditions humiliantes (Cass. Soc. 25 mars 1994).

 

 

 

(1) Art. L122-14-4 du Code du Travail     

(2) Art. L122-14-5 du Code du Travail     

(4) Art. L122-14-4 du Code du Travail     

(5) Art. L122-14 alinéa 2 du Code du Travail     

(6) Cass. Soc. 27 mars 2002     

(7) Cass. Soc. 23 juin 1999, pourvoi n° 97-42-241     

(8) Cass. Soc. 18 décembre 2000     

(9) Cass. Soc. 5 février 2003 pourvoi n° 01-01-672     

(10) Cass. Soc. 14 janvier 2003, arrêt n° 49 FS-P     

(11) A laquelle s'ajoute, pour les salariés protégés, une indemnisation pour violation du statut protecteur (Cass. Soc. 12 juin 2001